Hyper dominant à l'intérieur, Eugène Teague a converti neuf de ses onze tentatives vendredi face à Provence Basket (photo Jean-Marie Thuillier)

 

 

 

Poussé vers la sortie durant la présaison car pas au niveau, le pivot rookie de l'ALM a tenu bon, travaillé dur, pour prouver qu'il méritait sa place en Pro B. Vendredi, il fut le principal bourreau de Provence Basket (71-56).

 

Ah, si on nous avait dit ça, il y a deux mois... Qu'Eugène Teague deviendrait l'un des atouts majeurs de l'ALM Évreux, un élément qui, à défaut d'être toujours exceptionnel, ne déçoit pratiquement jamais (il n'est descendu qu'une fois sous les 10 d'évaluation - et encore, pour un 8 - en dix matches officiels). Si on nous avait dit que les coaches adverses parleraient de lui en des termes aussi élogieux que ceux utilisés vendredi soir par Rémi Giuitta, l'entraîneur de Provence Basket. « À chaque fois qu'il a été sur le terrain, c'est lui qui a fait la différence (il finit à 20 pts, 3 rbds, 17 d'éval). Même sur la zone, la puissance qu'il a mise... Combien de fois est-il allé enfoncer les mecs dans la raquette ? Même à un contre deux, il les a enfoncés pour aller au panier », ne put que s'incliner l'entraîneur visiteur, dont l'équipe doit cependant composer avec l'absence d'un véritable poste 5, Ramassamy, son pivot titulaire, ayant manqué tout le début de saison, ce qui explique en partie que la formation provençale galère à la dernière place.

 

Si on nous avait dit tout ça, avouons qu'on aurait eu du mal à le croire. On aurait surtout répondu : de toute façon, Teague ne sera plus là dans deux mois. Tout le monde le pensait, Rémy Valin en tête, au début du mois de septembre, alors que la phase préparatoire touchait à sa fin. Une présaison durant laquelle les performances de l'ancien joueur NCAA (25 ans le 2 décembre) ne furent pas conformes aux attentes. Statistiquement, il n'y avait pas à crier à l'arnaque (10,7 pts, 6,3 rbds). Mais la vision d'ensemble était décevante. Annoncé puissant (2,01 m, 120 kg), le natif de Brooklyn faisait surtout lourdaud, emprunté, pas vraiment dans le même timing que ses coéquipiers.

 

Son sort semblait scellé, ses valises presque bouclées, ne restait plus qu'à s'entendre avec son agent (Didier Salvat, ancien coach de l'ALM) sur les modalités de départ. Sauf que les deux parties ne sont jamais parvenues à trouver un accord... Valin fut obligé de se faire une raison : puisqu'il faut garder « Gene » Teague, autant tout mettre en œuvre pour le faire progresser. Dans son « malheur », le coach ébroïcien eut la chance de tomber sur un jeune homme sympathique et travailleur. « S'il a fait des progrès, c'est d'abord lui qui est à saluer, souligne ainsi le technicien. D'autres auraient dit : va te faire f.... si tu n'es pas content ! Lui non, dans la tempête, il n'a jamais lâché, il a gardé la même attitude, hyper positive, et s'est entraîné dur. »

 

 

« J'étais en mauvaise condition physique »

 

Pour le coup, le New-Yorkais avait conscience d'être le premier fautif. « J'étais en mauvaise condition physique. Lors des mois qui ont précédé mon arrivée, j'ai passé plus de temps en cours que sur les terrains de basket, car j'avais un diplôme à décrocher », explique l'ancien étudiant, que l'on avait vu en grande souffrance lors des tests de reprise. Teague assure en outre que même au plus fort de la tourmente, il n'a « jamais voulu rentrer aux Etats-Unis ». « Je savais que j'allais être meilleur en retrouvant la forme ».

 

Alors le gros nounours a redoublé d'efforts. « Déjà, à la base, on s'entraîne beaucoup avec ce groupe. Mais en plus, on les a pris, lui et Babacar (Niang), en séances individuelles, raconte Valin. On a fait un gros travail de fondamentaux, de vitesse. Il a aussi fait attention à son hygiène de vie, son alimentation. Il a perdu du poids. C'est un rookie, il découvre tout ça. Ses efforts payent. »

 

S'il n'est pas toujours transcendant en défense, rencontre parfois des soucis avec les coups de sifflet - « En NCAA, tu peux jouer plus physique », dit-il - et présente le plus faible taux de réussite aux lancers de l'équipe (50 %, 2/5 vendredi), Teague - 15,3 points, 6 rebonds, 16,3 d'évaluation sur les quatre derniers matches - s'améliore effectivement de semaine en semaine. Valin ose même la comparaison : « Ça me fait un peu penser à James Mathis la première année. Il était en vraie galère lors de la préparation puis était monté en régime. Et la saison suivante, il avait gagné tous les tests intermittents ! » Ça aussi, si on nous l'avait dit il y a deux mois...